L'épouvantail
Il était curieux
cet épouvantail. Oh ce n’était pas une œuvre d’art ! D'ailleurs, ce n'est
pas la raison d’être d'un épouvantail. Cet affreux jojo est là juste pour épouvanter la gent
ailée et autres intrus voleurs de graines, de fruits ou de légumes.
On le voyait
de loin. Il était imposant. C'était notre épouvantail.
C’ est vrai qu'il faisait peur au premier
abord. Il était démesurément grand, déhanché, désarticulé, de guingois. Cet
échalas avait une posture statique et un bras constamment levé. Il était devenu
le pote de tous les automobilistes qui circulaient sur la voie communale face au potager.
Les enfants avaient beau le narguer, les merles moqueurs se percher sur sa casquette, l'épouvantail restait impassible! Sous son air renfrogné, c'était un bienheureux.
Les enfants avaient beau le narguer, les merles moqueurs se percher sur sa casquette, l'épouvantail restait impassible! Sous son air renfrogné, c'était un bienheureux.
Perché
sur ses longues jambes tordues, qu'on aurait dit caoutchoutées, il s'appuyait sur sa fourche. Les anciens auraient dit,
en ironisant sur une personne peu courageuse, qu’elle donnait le sein à son manche.(Rein bronn d'ar forc'h)
Sa tête de citrouille était coiffée d’une
casquette bleue trop petite pour son crâne dégarni. Une petite moustache
dissimulait son sourire malicieux. Son regard scrutateur inspectait le paysage toujours dans la même direction.
Il portait un tablier bleu affichant sa
devise ou plutôt son éternelle rengaine : que la terre est basse ! Il
avait endossé une veste bleu-marine et chaussé mes vieilles galoches.
Son squelette était en noisetier constitué
d’un tronc qui faisait office de colonne vertébrale et de deux rameaux pour les
jambes et deux autres en guise de bras ; le tout rembourré de foin.
Ce qui faisait l’originalité du
personnage, en dehors de son aspect général grincheux, c’est qu'il avait toujours le bras
gauche en l’air, comme s’il saluait les passants.
Les automobilistes lui klaxonnaient, lui
levaient la main ! Ils pensaient tous que c’était moi le jardinier !
Souvent, planqués dans la cabane aux poules avec
mes petits-enfants, nous guettions les réactions des passants. Et
moi, je me disais : « Mais comment peuvent-ils me confondre avec
cet escogriffe ? »
Il n'est plus des nôtres ?
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