Un casque dans la poche
Mon oncle circulait toujours à moto. Il en a possédé plusieurs,
toutes aussi grosses que pétaradantes. Ensuite, une fois passée la quarantaine, il s'est assagi pour une mobylette,
puis pour une voiturette plus confortable. Oh! C’étaient pas des Harley Davidson, non pas du tout, elles
ressemblaient plutôt à celles des soldats allemands dans la Grande Vadrouille.
Mon oncle ne portait
jamais de casque. Aux gendarmes qui le contrôlaient, il rétorquait, plein d'assurance, que son
casque était dans sa poche! Et il sortait de son porte feuille un certificat
délivré par son médecin généraliste et qui attestait une contre indication absolue du
port du casque.
Un soir, pour un quelconque problème d'éclairage, il a été interpellé par la maréchaussée.
Contournant à vive allure un pâté de maisons en ville de Gourin, il avait réussi à semer les gendarmes dans un
premier temps. Ces derniers l’ont pris immédiatement en chasse et n'ont pas tardé à avoir notre fuyard en point de mire. Alerté par la lueur des
phares de ses poursuivants, mon oncle a quitté la route soudainement pour traverser un champ en direction d’une ferme
éclairée. Sa course folle a été stoppée par une clôture qui l'a projeté au
sol. Il a atterri dans une pâture épaisse qui a amorti sa chute. Abandonnant sa moto, il a
couru, en traînant la jambe, vers l’étable où brillait une lumière.
Quatre personnes y étaient
affairées à tirer sur une corde pour aider une vache à vêler. Notre motard
s’est joint rapidement au groupe pour lui prêter main forte.
Les gendarmes ont fait irruption dans la crèche quelques minutes plus tard. Ils ont demandé aux hommes, toujours
en plein effort car c'était une mise bas difficile, s’ils n’avaient pas vu rôder un individu probablement blessé.
Evidemment,
personne n’avait rien vu ! Tout le monde avait compris!
La maréchaussée repartie, le tonton a poussé un ouf de soulagement. Au même instant, le veau est venu au monde. On lui a chatouillé les narines avec une paille, versé un peu d'eau dans chaque oreille, désinfecté le nombril avec du lambig et bouchonné le corps avec une poignée de paille. Hop! le voilà déjà debout sur ses jambes branlantes, léché par sa mère.
Ces deux événements, j'allais dire ces deux délivrances, ont été bien arrosés à coups de grogs à la gnole.
Mon oncle a récupéré sa moto aidé par le clair de lune et est rentré chez lui fourbu mais soulagé.
Le lendemain, il était cassé de partout! Mais il avait toujours son casque dans la poche!
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