lundi 29 avril 2019

Le coq de Jérôme.


Le coq de Jérôme.

     Quand j’étais instit, il y aura bientôt quatorze ans que je ne le suis plus , chaque fin d’année scolaire, la veille des grandes vacances, je partais toujours avec mes élèves faire une balade dans la campagne environnante. Je pense que tout le monde garde un bon souvenir de ces petites randonnées pédestres qui nous menaient vers Leing Hallec et Strakou, le fameux chemin des sources, une petite route ombragée. Chacun avait dans son cœur le souvenir de l’année écoulée et la perspective des grandes vacances toutes proches. A la rentrée, ce serait le collège pour les plus âgés.
     Cette année-là, Jérôme a insisté pour que nous allions voir son coq, chez son tonton. Comme c’était une promesse que je lui avais faite toute l’année scolaire, supplié par ses camarades, j’ai fini par accepter conscient que ce détour imprévu allait perturber notre timing.
     Magnifique ce coq dressé sur ses ergots au milieu de la basse-cour. Et quel plumage ! Une crête royale… Un chant impérial, une cour révérencieuse...
     Nous avons finalement repris notre balade, sous la canicule, en pressant le pas. Tout le monde s’accorde à dire que le temps perdu ne se rattrape jamais.
     Nous avions accumulé un sacré retard et l’impératif de l’horaire du car scolaire planait au-dessus de nos têtes. Nous étions carrément dans le rouge ! Pourtant, il fallait s’arrêter ici et là pour parler des captages d'eau qui alimentent gravitairement la commune, des digitales, des stellaires, de l’oseille, du hêtre, de la différence entre hirondelles et martinets, de l’amont et de l’aval du ruisseau…
     Quel retard ! Rien à faire, le car attendrait et les parents pesteraient comme dab…  Soudain, derrière nous, un bruit de moteur. C’était Christian, l’employé communal, qui descendait le chemin de Strakou avec tracteur et remorque.
     Nous avons tous agité le pouce pour faire du stop. Tout sourire, Christian s’est arrêté pour nous permettre de grimper dans la remorque. Et le convoi est reparti. Quelle joie dans la remorque qui nous secouait en passant dans les nids de poules. C’était le pied !
     Nous sommes entrés dans la cour de l’école, cheveux au vent, avec à peine quelques minutes de retard.
     Je suis sûr que Jérôme s’en souvient, ses camarades aussi. L’instituteur que j'étais également car cette manœuvre n’était pas du tout réglementaire …  Un bon souvenir.
    

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