samedi 6 avril 2019

Faute de grives, on mange des merles


La chasse aux merles


     Quand il ne restait plus de pommes au sol, donc en hiver et au printemps, nous installions des pièges pour capturer les merles. Cruelle pratique, me direz-vous.

     J'en conviens mais tous les enfants de la campagne pratiquaient cette technique barbare. Un piège à rat « Lucifer » recouvert de feuilles mortes et appâté avec une belle pomme. Il n’y avait plus qu’à attendre.

     Le lendemain matin, le piège s’était refermé sur un merle où une grive. Gagné ! On sentait poindre un petit sentiment de fierté.

    J'enveloppais le pauvre oiseau frêle, tout froid et raide dans du papier journal. Je glissais le gibier dans mon cartable et, avant l'ouverture de l’école, j’allais  le vendre à l’épicerie du coin, chez Charles Le Bras, contre une pièce de cinq francs de l’époque.

     Je pense que le commerçant revendait les oiseaux à un restaurateur.

     Aujourd’hui, je regrette cette chasse impitoyable et j’accueille avec plaisir les merles et les grives qui nichent dans mes haies.
 

     L’oiseau moqueur noir au bec jaune se délecte bien sûr de mes cerises et de mes fraises mais sa présence et son sifflement « turlututu chapeau pointu » me sont si agréables que je lui pardonne sa gourmandise.
 
 

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