Le
bombardement de Trévarez
Texte publié le mercredi 3 avril 2019
(D'après le témoignage de Lili Le Goff de Saint-Goazec. Il avait 9 ans. )
Nous
sommes le dimanche 30 juillet 1944, jour du pardon annuel du Moustoir. Aussi
radieux que le soleil est généreux, Lili
a revêtu pour la circonstance, ses beaux habits de sortie. Comme le veut
la tradition, il se rend à vélo à la petite chapelle du Moustoir en compagnie
de sa maman, son frère et sa sœur, pour
assister à la messe qui sera célébrée à dix heures trente par le recteur de la
paroisse. Francis, le père, ne fait pas partie de l’expédition : il est
allergique aux curés.
Lili arbore fièrement son
costume du dimanche. Oh ! il ne la porte pas souvent cette tenue qui
associe un veston et une culotte courte. Ses chaussures noires et vernies
semblent mal assorties au complet gris. Arpentant la terrasse, il attend impatiemment
le reste de la famille qui finit de se préparer.
Lili sait que les
Allemands sont là, à Saint-Goazec, qu’ils font la pluie et le beau temps.
Le
temps est calme à cette heure matinale. La rosée nocturne perle encore sur les
hautes herbes auxquelles s’accrochent des toiles d’araignées. Les hirondelles
déjà très actives fendent le ciel bleu. Elles
volent haut dans l’azur : Lili sait que le beau temps est en train
de s’installer durablement.
Soudain, l’enfant
perçoit comme un grondement sourd qui vient troubler le silence de cette
paisible matinée estivale, une sorte de vrombissement qui s’amplifie et semble provenir du côté de Châteauneuf
du Faou. Le tonnerre ? Non, le vacarme devient assourdissant. Lili court se
poster imprudemment au beau milieu de la
chaussée. Toute la maisonnée est maintenant sur la terrasse.
A peine Lili a-t-il le
temps de lever les yeux qu’un escadron d’avions chasseurs fend l’air au-dessus
de sa tête. Les quatre engins volent à si basse altitude qu’on peut distinguer
leurs occupants. Des pilotes le saluent même au passage d’un signe de la
main.
Du haut de ses dix ans,
l’enfant a bien reconnu les «Spitfires » anglais. Les avions de reconnaissance se dirigent tout
droit vers le Château de Trévarez dont la silhouette rose se découpe dans
l’horizon boisé, au milieu de son vaste domaine tel un bijou dans son écrin. (à suivre)
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