jeudi 28 février 2019

SCENES DE MOISSON

Deux chevaux transpirants tiraient la faucheuse autour de la parcelle de blé dans un cliquetis de lame, soulevant un nuage de poussière. Une sorte de muselière en grillage empêchait les animaux de manger les céréales dont les épis leur chatouillaient les naseaux. Assis sur la machine mon père guidait l’attelage. Du pied droit, il actionnait une pédale qui relevait et abaissait un râtelier fixé derrière la barre de coupe, libérant le contenu des javelles. Derrière, les femmes, courbées, un chapeau de paille sur la tête, une faucille à la main, liaient les gerbes. De temps en temps, le bruit de la bielle qui provoque le va-et-vient rapide de la lame se taisait : tout le monde se rassemblait à l’ombre d’un chêne pour se désaltérer. Le verre de cidre avalé, le travail reprenait de plus belle. Les javelles étaient dressées par six en forme de hutte pour permettre au grain et à la paille de sécher sous l’action du soleil et du vent. Mon père décortiquait fréquemment un épi pour savoir si la moisson serait bonne.
Quelques jours plus tard, les gerbes étaient rentrées à la ferme dans des charrettes et soigneusement rangées en meules sur l’aire à battre. Chaque tas était coiffé d’un cône de paille pointu destiné à le protéger de la pluie.
Enfin arrivait la batteuse, une « Braud », toute bleue, actionnée par un moteur à essence. L’entrepreneur installait ses machines dans un plan horizontal et les alignait avant de les relier à l’aide d’une longue courroie. Le lendemain matin, vers 9 heures, les voisins arrivaient et le vieux moteur pétaradait, entraînant la batteuse qui mugissait de plus en plus fort jusqu’à ce qu’elle atteigne sa vitesse de croisière. Déjà chacun était à son poste. Les premiers, perchés sur une meule, jetaient les javelles sur la table, un autre coupait les liens, le suivant étalait la paille que le troisième enfournait à grandes brassées dans la gueule de la machine. Celle-ci les avalait dans un bruit caractéristique, tel un ronronnement de satisfaction. Pendant ce temps, les préposés aux sacs s’activaient et l’échine courbée, escaladaient l’échelle souvent raide  pour verser le précieux grain au grenier ; tandis que les autres, armés de fourches à deux doigts, transportaient la paille dorée aux tasseurs qui en faisaient une meule parfaitement géométrique. Les femmes ramassaient la balle ; écorce des graines qui, une fois bien sèche, servirait à garnir taies d’oreillers et édredons. Vers 10 h 30 le ronflement de la batteuse cessait : c’était l’heure du « leign vin ». Le travail reprenait de plus belle jusqu’à midi. Après un copieux repas, chacun reprenait son poste jusqu’au crépuscule.
Après une journée de dur labeur, émaillée de quelques farces ou anecdotes, on se lavait les mains dans le seau d’eau, on s’en mouillait furtivement le visage… un coup de serviette, et à table ! Tout le monde mangeait de bon appétit. On buvait un petit coup, un bon coup même ! Certains poussaient une chansonnette, d’autres racontaient une histoire gauloise… ou, par exemple, attachaient deux hannetons par les ailes pour les faire tournoyer au-dessus de la table… On préparait aussi la journée du lendemain tout en roulant une cigarette de gris. Ce n’est que fort tard que quelqu’un se décidait enfin à se lever, entraînant dans son mouvement le reste de l’assemblée.

C'était il y a un an!

Voici notre cascade le 28 février 2018. Il faut dire qu'il avait fait très froid depuis le 24 février, jusqu'à -8,7°.
Aujourd'hui, la froidure semble revenue. J'espère que nous ne connaîtrons pas la période de frimas de l'an passé. Ce serait cruel pour la nature… Il vaut mieux maintenant qu'en avril, me rétorqueront certains. La météo est de toutes les conversations. Quand on ne veut pas dire du mal de son voisin, on parle du temps! Ca fait moins de courants d'air!

mercredi 27 février 2019

NOS JARDINIERES PRINTANIERES

Nicole a magnifiquement garni ses jardinières avec des fleurs printanières. Les jacinthes, les pensées s'épanouissent et exhalent généreusement leurs délicieux  parfums . Les jardinières sont installées sur la fenêtre. Ces fleurs printanières sont très coquettes.
 
 
J'ai remarqué que le printemps est aussi entré dans la cour de nos voisins Jeannette et Jean-Marie. De magnifiques primevères colorées ornent leur parterre. Pas de doute, le printemps est bien là. Mais attention aux caprices de la météo!

QUIPROQUO


 quiproquo

Justement,  ce dimanche-là,  taupes étant de plus en plus actives dans ma pelouse, je creusais comme d'habitude sur les galeries à la recherche d'un poste de piégeage idéal.

   Je n'avais pas remarqué la présence, de l'autre  côté de la route, d'un autre retraité du village, Jean, le beau-frère de Pierre.






  

Un outil à la  Un outil à main, il semblait faire la même chose que moi dans le champ d'en face.

   Je l'interpelai car chez nous on doit le respect aux anciens.

   - Bonjour Jean. Comment ca va?

   - Oh ça va, marmonna-t-il.

   - J'en ai marre de ces saloperies de taupes... répondis-je en donnant un coup de pied dans une de ces satanées taupinières qui faisait partie d'un archipel de monticules.

   - Elles sont délicieuses! Hier, avec mon copain Roger, on en a pris trois. On s'est régalés! J'ai jamais rien bouffé d'aussi succulent gast!

   - Comment? Délicieuses? Tu les manges? Beurk!

   - Mais oui bien sûr! Dans la poêle à  frire avec du beurre. Mon Vieux, c'est un régal! Je t'en apporterai une ce soir car je retourne au canal cet après-midi. Je suis sûr que par ce temps orageux, les anguilles seront voraces...


   Vous aurez bien sûr saisi que Jean ne chassait pas les taupes mais qu'il cherchait lui des vers de terre pour la pêche.







  

mardi 26 février 2019

ART FLORAL

Bouquet réalisé par Nicole au cours d'art floral animé par Nicole Le Bihan.
(camélias, joubarbe, phormium)
 
 
 
Variante du bouquet, avec des lisianthus blancs.
 

 
Variante de Marie-Claire avec des Gerberas.


lundi 25 février 2019

LE PILHAOUER



Le claquement régulier des sabots ferrés d’un cheval résonne sur la route empierrée qui mène au village. Le bruit s’amplifie, s’accélère. Au sortir du dernier virage, apparaît un petit attelage. Un homme moustachu, coiffé d’une casquette est installé à l’avant de la charrette, les genoux écartés, une pipe courte serrée entre ses dents blanches de romanichel. Il agite machinalement les rênes du postier breton qui trotte gaillardement. Le visiteur pousse  des hue et des dia en caressant la croupe de l’animal de la lanière menaçante de son fouet. Le cheval renâcle, frémit des naseaux avant de s’arrêter au beau milieu de la cour carrée de la ferme.— Ho ! Repos Fleurette. Halte ma biche. Bonjour Madame, bonjour petit bonhomme. Je suis le chiffonnier, celui qu’on appelle  le pilhaouer. Vous n’auriez pas un seau d’eau bien fraîche à offrir à ma Fleurette, s’il vous plaît ? Elle meurt de soif.

Maria lui sourit et, considérant les grands sacs bourrés de chiffons et de fripes qui s’entassent pêle-mêle dans sa carriole aux grandes roues en bois cerclées de fer, elle se dirige vers le puits. Elle y précipite le seau en ferraille par-dessus la margelle du trou noir. Le treuil de bois se dévide rapidement de sa chaîne dans un couinement épouvantable. Maria tourne péniblement la manivelle pour remonter le récipient rempli d’eau fraîche. Son geste régulier s’accompagne de grincements. Des gouttes retombent au fond en émettant des sons cristallins. L’attelage s’est maintenant approché de l’abreuvoir. La jument hennit de plaisir avant de se désaltérer en plongeant ses naseaux tout mous dans l’auge en pierre. Maria puise un  un deuxième qu’elle verse dans l’abreuvoir déjà vide. Fleurette la remercie en martelant sol trois fois du sabot avant droit.

— C’est gentil, Ma p’tite dame. Je vous offrirai un p’tit quelque chose. Vous avez sûrement des « pillous » ?

— Oui, j’ai quelques vieilleries que j’ai mises de côté. On m’avait laissé entendre que vous étiez dans le secteur. Vous avez de la belle vaisselle ?

— Eh oui, ma p’tite dame, je viens vous donner le bonjour tous les ans, déclare-t-il en laissant échapper un petit nuage de fumée de sa bouffarde, J’ai de la porcelaine magnifique, madame, de la véritable porcelaine de Limoges. Regardez les jolis motifs sur ces assiettes ! Des fleurs, des oiseaux, une montagne. Et ces bols, madame, voyez ces écuelles pour la bonne soupe café du matin! Il est pas là le pépé ? Le spécialiste de la bonne soupe-café ?
— Ah, non, il est descendu vers la rivière. Il s’inquiétait du niveau de l’eau  pour les vaches.

--C’est la sécheresse. Mais je vois que votre puits n’est pas encore tari. Bon, revenons à nos chiffons.

Maria ressort aussitôt de son penty chargée de deux sacs volumineux. Le pilhaouer suspend les baluchons l’un après l’autre à son peson et, après un moment de cogitation, annonce :
  ---Vous avez gagné une douzaine d’assiettes et six bols, ma p’tite dame. Par-dessus le marché, je vous mets comme promis une écuelle pour votre père. Ah ! la bonne soupe café du pépé ! Comment il disait déjà? Euh… Du pain, pas trop frais, déchiqueté en petits morceaux, sept ou huit morceaux de sucre, on arrose de café bien chaud,  on laisse tremper, on mélange, on y verse du bon lait bouilli avec sa crème, on tourne avec la cuillère. Et là, on inspire, on renifle la merveilleuse odeur et ON DEGUSTE! c'est bien comme ça qui dit le vieux?
-- Oui, sans doute, répliqua ma tante en souriant.

Allez hue Fleurette! Et voilà l'attelage reparti." A l'année prochaine!"


- 



Du reuz dans la prairie




DU REUZ DANS LA PRAIRIE

 

     C'est en marchant vers la ferme familiale par le chemin des éoliennes le jour de l’an que cette merveilleuse histoire a refait surface dans ma petite tête. Histoire qui aurait pu avoir de graves conséquences… Mais qui est devenue un souvenir croustillant, toujours resservi à chaque repas de famille.
 





 

DU REUZ DANS LA PRAIRIE. Chapitre I


     Souvenirs, souvenirs…Ce matin du jour de l’an, alors que nous marchions sur le chemin qui mène au village de mon enfance, un délicieux souvenir a ressurgi dans ma petite tête… Croustillant aujourd’hui, cet épisode m’avait quelque peu terrorisé il y a un plus de cinquante ans, au moment des faits. Cette mésaventure a eu pour théâtre d’opérations un joli petit pré. Elle s’est déroulée un après-midi au début des grandes vacances. Exceptionnellement, nos parents nous avaient accordé une petite récréation… C’était si rare que cette pause était aussi délicieuse qu’un bonbon ; surtout que nous avions une sacrée idée derrière la tête !
 
     C’est vers cette petite prairie, celle du grand-père, « Tapern » que nous avons couru en dévalant ce chemin creux à toutes jambes. Blottie au bas du chemin creux, en face d’un petit pont, la parcelle était douillettement entourée d’arbres. Un ruisseau y dessinait de paresseux méandres. Son murmure accompagnait le chant des oiseaux ainsi que le bruit des bêtes de l’herbe dans la chaleur de l’été.
 
C’est donc ici que nous fîmes notre redoutable expérience.
 
Confortablement installés à l’ombre, accroupis dans l’herbe fraîche, nous déballons fébrilement l’arsenal que nous avions discrètement et délicatement enfoui dans nos poches. La parfaite panoplie du véritable artificier !

 

CHAPITRE II. DU REUZ DANS LA PRAIRIE

 

     J'allais oublier de vous préciser que le cadet de notre tribu a fait toute sa carrière en qualité d’ingénieur dans l’aéronautique. Il a contribué activement à la mise au point des Airbus A 320 et A 380. Vous comprenez pourquoi Pierrot avait déjà le feeling inné d'Icare. Mais lui ne se brûlera pas…

     Notre initiation fortuite s’est faite par hasard au collège, lors d'une récréation après la cantine, dans un coin retranché de la cour, loin des bureaux de l'administration. Alors que nous faisions les cent pas en devisant à bâtons rompus sur nos projets de vacances, notre attention fut attirée par un attroupement. Soudain, une explosion nous fit sursauter, suivie d’un sifflement. Une espèce de fusée fendit l'espace, au-dessus du groupe de potaches. Dans son sillage, une traînée blanche l’accompagna jusqu’à un vieux mur en pierres contre lequel elle se fracassa sous les applaudissements des spectateurs ébahis. Une odeur de pétard mouillé nous irrita la gorge.
 
     Un pion à l’horizon ! L’alerte fut donnée. Le groupe se dispersa dans les quatre coins de la cour, ni vu ni connu. Un coup de sifflet. Tout le monde se rangea et les cours reprirent comme si de rien n'était. Derniers cours de l’année dans l’atmosphère étouffante de la salle de classe. Demain, pour nous trois, ce seront les "vacances" aussi, c'est à dire les travaux des champs, la traite des vaches, le binage et la cueillette des pois et des haricots… En récompense, le plaisir tant attendu et si mérité du sommeil réparateur de la nuit.
 
     Pour Pierrot, il faut battre le fer tant qu’il est chaud. Curieux de nature et très bricoleur, il va immédiatement aux informations sur le principe et la conception de la fusée. Au cours de la récré suivante, les astronautes en herbe auteurs du tir de midi, pas très scolaires mais fiers comme Artaban, lui détailleront la liste des matériaux composites nécessaires à la fabrication du missile. Ils lui révèleront même les astuces de montage. Secret d’état !


 

Chapitre III. DU REUZ DANS LA PRAIRIE


     Dans le pré, c'est le bonheur. La nature semble assoupie sous ce premier soleil estival. Les oiseaux et les insectes, eux, s'en donnent à cœur joie et chantent à qui mieux mieux. La cardamine des prés sent bon du mieux qu’elle peut et ses effluves sucrées, soufflées par la brise, régalent notre odorat. Quant à la rivière, elle suit son cours paisiblement et apporte un peu de fraîcheur à ce tableau bucolique.

-Tiens, là, entre les hautes graminées, une pierre plate. Elle servira de rampe de lancement à notre fusée ! dit Christian en la plaçant comme il faut entre les hautes graminées. Il fait ensuite l’inventaire du matériel : une boîte d’allumettes, la grosse, celle que nous avons chipée dans la cabane où on fait cuire les patates aux cochons, du papier journal qui a subi une immersion chimique (dont je ne peux dévoiler ici le secret. Seul Christian connaît le sésame. Il bénéficie même de la complicité de sa mamm goz, la grand-mère, qui fait sécher la « came » sur son fil à linge), une pince, un petit bout de ficelle et un tube de comprimés en métal.

- Vite, déclarai-je, pas de temps à perdre car notre petite récré aussi exceptionnelle soit-elle, ne va pas durer des heures. Tout à l’heure, du haut du chemin creux qui mène la ferme, une voix autoritaire va nous rappeler à l’ordre et distribuer les consignes de boulot à chacun!

     Pierrot saisit le tube métallique et le bourre de papier journal. Il introduit la ficelle en guise de mèche et la laisse dépasser du tube dont il ferme l’extrémité en l’écrasant à l’aide de la pince. Notre missile est prêt.
 
     C'est Christian qui le positionnera délicatement sur la rampe de décollage en tenant compte de tous les paramètres : l’inclinaison, la stabilité, la direction du vent, la trajectoire envisagée, l’issue de secours qui permettra aux artificiers de se carapater en cas de mauvaises donnes.
 
     Moi, je craque l’allumette… UN COUP DE VENT malencontreux éteint la flamme ... ZUT !!!


 




 

Chapitre IV. DU REUZ DANS LA PRAIRIE


     Cette fois, la mèche s'enflamme. Nous nous écartons prudemment. Heureusement !

     La fusée décolle, effectue un saut de grenouille dans un léger crépitement d'étincelles et retombe lamentablement au sol. Déçus, nous nous rapprochons de l’épave inerte sans appréhension aucune. Pas grave, les Américains n'ont pas réussi du premier coup eux non plus et ils ont pourtant marché sur la lune !
 
     Au moment où je m’apprête à la saisir, la voilà qui rejaillit de la touffe d'herbe où elle avait chu et qui me frôle la tête dans un sifflement assourdissant qui décoiffe ! Elle retombe quelques mètres derrière moi en explosant violemment, complètement disloquée ! Ouf, j’ai eu chaud!
 
     C'est à ce moment précis que notre mère nous appelle de toutes ses cordes vocales. Vite, il faut tout ramasser et ranger le matos dans les poches. Incognito !
 
     Panique dans le pré. Les grillons ne chantent plus, les oiseaux se sont tous envolés. Nous, on n'en mène pas large. Heureusement, tout le monde s'en sort indemne. D'un commun accord, il a été immédiatement décidé d'abandonner à jamais ce projet explosif et démoniaque.


 
 

Chapitre V. DU REUZ DANS LA PRAIRIE


     Derrière nous, nous laissons une herbe quelque peu écrasée par nos piétinements mais aucune trace de notre dangereuse manipulation, si ce n’est une touffe de pissenlits roussie par la flamme et une forte odeur de poudre que la brise dissipe aussitôt. Dans la précipitation provoquée par la sommation au rassemblement, c'est moi qui prends le gros du matériel en vrac. Les poches bien chargées, je cours en tête du trio, bondissant par-dessus les profondes ornières durcies par sécheresse. Il ne faut pas lambiner quand la mère sonne le rappel sinon ce sera la sempiternelle remontée de bretelles ! L'engueulade qui plombe l'ambiance jusqu'au lendemain. Il ne faut surtout pas qu’elle découvre ce que nous faisions.

Nous voici déjà au bout du chemin qui débouche dans la cour.
 
Soudain, une explosion ! Un nuage de fumée, des cris...
 
Une vieille tante qui prend le soleil, assise sur la margelle du puits, lève les bras au ciel, éberluée…

 

 

Soudain, je ressens une forte chaleur au niveau des cuisses. Je me rends compte que c’est moi ! Des flammes s’échappent de mes poches. Ça sent le plastique et les poils brûlés. Mon pantalon en Tergal fond au niveau du bassin. Suis-je en train de m’immoler ? Je panique ! Je me déshabille illico presto en criant je ne sais plus si c’est de peur ou de douleur. Le nylon de l’intérieur des poches est collé à mes cuisses. La peau s’arrache douloureusement par lambeaux avec le vêtement. Rassurez-vous l’essentiel a été préservé et est resté intact ! Ouf ! Mais quand même !

 



 

On me conduit immédiatement chez le médecin qui me prescrit du tulle gras et me recommande d’acheter un briquet. Car j’affirme à tout le monde que l’incident a été provoqué par l’explosion de la boîte d’allumettes. Personne n’a jamais entendu telle ineptie et le scepticisme se referme sur moi. Le buraliste du coin, adjoint au maire, personnalité digne de confiance, est pourtant venu à mon secours en affirmant mordicus qu’il avait entendu dire qu’un tel phénomène avait été observé il y a quelques années du côté de Scaër. Du coup, ma version est devenue plausible. Nos parents ont fini par admettre que c’était ainsi parce que c’était comme ça. Jusqu’au jour où, trente ans plus tard, à brûle pourpoint, nous leur avons révélé la vérité.



Il s’agit d’une histoire vraie. Une allumette en liberté s’est probablement enflammée contre la boîte et le feu s’est propagé d’une poche à l’autre par la magie du journal explosif.

NOTRE BASSIN

    Ce bassin est ma fierté. Depuis toujours, j'adore regarder couler le ruisseau et écouter son doux murmure. Un point d'eau, voilà ce qu'il me fallait, avec de la vie dedans et autour!
     Je l'ai creusé à la pelle il y a une bonne dizaine d'années. Petit à petit, il a acquis un aspect naturel et s'intègre parfaitement maintenant dans son cadre de verdure, au fond de la pelouse, tourné vers la maison d'où le bruit de la cascade est bien perceptible. Cette chute d'eau qui rebondit sur des pierres plates est éclairée jusqu'à 22 heures. L'eau qui gicle et qui éclabousse les fougères dans le faisceau de lumière est du plus bel effet.



 
Il y a toujours quelque chose d'intéressant à observer au bassin.
En hiver, quand vient le frimas, la cascade sculpte des ourlets de glace et la surface de l'eau se fige. Pourtant, il y a de la vie dessous: trois carpes et une multitude de poissons rouges y nagent paresseusement en semi-hibernation.
 
 
Puis, les jours allongent. En février-mars, le bassin devient le lieu de rassemblement des batraciens. C'est le moment des amours. Grenouilles et crapauds s'y donnent rendez-vous la nuit venue. Des amas d'œufs s'accrochent en chapelets aux rares plantes aquatiques du moment. Les batraciens se déplacent les uns sur les autres. Leurs amours sont parfois cruelles: certains y perdent une patte, ou même la vie! Les coassements aussi sont impressionnants.



Plus tard, les têtards naîtront et subiront leurs métamorphoses.
Enfin, tout le monde s'en ira. Quelques grenouilles, cachées sous les pierres de la cascade, chantent mélodieusement.

Avec le printemps, les poissons deviennent plus vifs. Les insectes n'étant pas encore suffisamment nombreux, il faut nourrir les poissons.
Les plantes se réveillent: la renoncule, arums, joncs, jacinthes, iris, papyrus, nénuphars…
Les hirondelles volent à fleur d'eau.
Les oiseaux y font leur toilette et s'y désaltèrent.
L'été, vient la libellule. Elle vole au-dessus de l'onde et se pose sur les plantes pour y inoculer ses œufs.
Attention au héron! Il vient parfois dire bonjour aux poissons.
Bref, le bassin est un véritable écosystème.
Croyez-moi, creusez un bassin...




Abécédaire du remembrement (ou du démembrement)


 Abécédaire que j'avais écrit au moment où je travaillais sur mon roman "Les roses ont des épines ". Cet abécédaire ne figure pas dans mon livre. Alors, je vous le propose... 

Arbre : Le printemps vert tendre le réveille dare dare (et dard dard) en lui ouvrant les yeux, tandis que l’automne mordoré pleure ses feuilles à chaudes larmes. Habillé puis dévêtu, il rythme les saisons et ajoute des cernes et des rides aux années qui passent. C’est une espèce en voie de disparition.

Bulldozer: Monstre préhistorique qui se meut lentement sur des chenilles ; véritable char d’assaut, à ne pas laisser entre les mains de l’homme faible capable d’anéantir l’armée des arbres et d’effacer les empreintes de plaisir et de labeur que nos aïeux croyaient indélébiles.

Champ : Tu as ton caractère, tes particularités, tes trésors bien gardés dans l’intimité des haies boisées. Ils vont violer ton intimité.

Désertification : Exode rural vers la capitale et les USA, tu vas vider nos campagnes et encore t’accroître avec la modernisation de l’agriculture. Mais ceux que tu expatries ont-ils dans leur ville-lumière le visage radieux qu’ils arborent quand ils reviennent passer quelques jours de vacances au pays natal.

Ecosystème : Le talus, la mare, les haies, le vieux mur, le landier, la tourbière, autant de milieux vivants où faune et flore se régulent, sont voués à la disparition, balayés par la lame assassine.

Fossé : Celui qui sépare les classes sociales s’élargit inexorablement. Celui que creuse le remembrement brouille les paysans autrefois amis. L’un comme l’autre draine ; l’un et l’autre séparent…

Garenne : Que tu sois lapin ou pré, ton existence est menacée…

Haie : Profite bien du moment présent, jolie haie bucolique… Bientôt, ils te conjugueront au passé et diront « était ».

Impact : Ils sont tellement nombreux que je laisse à la nature le soin de les énumérer.

Journal : C’était autrefois la surface de terre qu’un cultivateur pouvait charruer dans la journée. C’est à croire que les Bretons du Nord étaient plus courageux que ceux du Sud. (Le journal variait de 48 ares à 44 ares).

Kaléidoscope : Je me rappelle ma joie, le jour où, enfin, comme tous les copains d’école, je parvins à gagner mon kaléidoscope en achetant des mistrals gagnants dans une épicerie du bourg. Ce petit appareil équipé de miroirs à facettes m’en faisait voir de toutes les formes et de toutes les couleurs ! Rien de tel pour refaire le monde !

Lune : J’ai toujours été fascinée par l’astre de la nuit. Toute petite, j’y distinguais une tête avec des yeux, un nez et une bouche. Puis, il y eut les éclipses que mon grand-père m’apprit à observer, ainsi que les différentes phases lunaires ; la nuance entre lune montante et lune croissante ; les premiers pas de l’homme dans la mer de la tranquillité… Maintenant, c’est encore elle qui détermine les travaux du jardin et les prévisions météorologiques. Messieurs les techniciens, vous ne me la ferez pas gober en plein jour…

Machines : De plus en plus modernes et encombrantes, elles pourront facilement circuler d’une parcelle à l’autre et leur travail sera facilité par le remembrement.

Nature: Chassez le naturel ; il revient au galop.

Oiseaux: Ne me dites pas qu’il n’y aura bientôt plus que des oiseaux rares !

Primevères laiteuses et tendrement parfumées vous fleurissiez les talus au moment où les arbres déployaient leurs toutes premières feuilles, comme je vous ai humées et adorées ! Maintenant vous ne vous épanouissez plus ; les herbicides et le débroussaillage mécanique vous ont hélas exterminées…

Querelles : Oh ! Querelles de voisinage et vieilles rancunes du passé, vous voilà réveillées… Conflits sévères et parfois dramatiques ou disputes évoluant en mutisme…

Remembrement : également appelé aménagement foncier. Je me souviens de ce massacre bocager et de la désolation du paysage après le passage des bulldozers ! Plus un arbre, plus un talus ! Adieu chemins creux ! Je crois que la nature ne s’en remettra jamais… Moi non plus !

Solitude : Tu guettes le cultivateur…

Talus : Obstacles désordonnés et échevelés d’aubépines et de houx hirsutes, les techniciens agronomes ont feint d’ignorer vos vertus.

Uniformité : L’ennui un jour naquit de l’uniformité.

Vent : Plus rien ne l’arrête. Bientôt, il décornera les bœufs.

Water-closet : Comment satisfaire maintenant ses besoins à l’abri des regards indiscrets ?

Xylophène : Dans le but d’éviter les déperditions de chaleur, le maire avait décidé de faire installer un double parquet dans ma classe. Ce travail fut exécuté en un weekend. La semaine suivante, mes élèves furent d’un calme mémorable… Certains s’endormaient même sur leur pupitre, anesthésiés par les vapeurs du traitement du bois !  Ah ! Si nous pouvions aussi anesthésier les technocrates qui réfléchissent de trop !

dimanche 24 février 2019

POINTE DU RAZ

Quel paysage splendide, ici au bout du monde au Cap Sizun. En face, le cap de La Chèvre s'avance dans la brume. Brume de chaleur? Je ne sais pas. Toujours est-il que la température est très printanière et avoisine les 19 °. Le silence à l'état sauvage. Un chalutier traverse la baie mais on ne l'entend pas. Il est loin
Ici, les distances sont démesurées. L'eau est turquoise, l'endroit, paradisiaque.

samedi 23 février 2019

Les primevères


Chaque printemps, des centaines de primevères fleurissaient l'un des talus qui longent le chemin menant au village. Elles s'épanouissaient face au couchant et formaient un tapis du plus bel effet. Les anciens les appelaient boked-laezh, ce qui signifie "fleurs de lait". Elles annonçaient la période des nids, les vacances de Pâques. Je ne comprenais pas pourquoi on ne disait pas "primes vertes"...
Maintenant, elles n'existent plus. Les herbicides et le passage répété des épareuses en ont eu raison.

Il ne faut pas confondre ces fleurs nobles avec le simple bouton d'or ou la ficaire (boked amann), les fleurs du beurre.

Un blog pour raconter... pas un blog de caquetage "à la clochemerle"

Bonjour, j'ai décidé d'ouvrir ce blog pour exprimer mes passions, mes anecdotes, mes souvenirs, mes coups de coeur, mes coups de gueule aussi. Je parlerai beaucoup de fleurs, de jardinage, de bassin, de balades, de lecture et d'écriture, de randos et de piscine, de tout ce qui m'anime et de tout ce qui me révolte. Ma vie, quoi. Mais jamais de mon intimité ni de celle des miens.
 
Notre jachère fleurie. Un régal pour les yeux, des odeurs enivrantes, un délice pour les abeilles, hélas de plus en plus rares...
Voici mon bassin, ma fierté. J'ai toujours rêvé d'avoir un point d'eau. Tout jeune, j'adorais aller voir couler la rivière.
Un bassin vous émerveille à chaque saison par sa faune, sa flore et le murmure de sa cascade.
Porspoder, le phare du Four, quels magnifiques paysages que nous a fait découvrir notre fille Isabelle.
La Torche et ses tulipes. La chapelle dans son écrin rouge. C'est pas beau ça?
La Pointe de la Torche, paradis des surfeurs, avec ses rochers fouettés par les vagues.

AU FIL DU TEMPS

L"amour est dans le pré.

Le jour de la Saint-Valentin, Sauvage (Bleu de Vienne) a fait un bisou à Biscotte (fauve de Bourgogne).

Allez! Au boulot!

Oui, tous à vos bouleaux! C'est en effet le moment de collecter leur sève limpide aux vertus insoupçonnées.

Les poules au potager.

Ces gallinacées peuvent être de précieuses alliées pour le jardinier. Elles grattent et grattent encore la terre fraîchement labourée . Que ne feraient-elles pas pour gober un ver? Aucun lombric n'échappe à leur vue perçante ni à la précision de leur bec.
Le jardinier, lui aussi aura mérité un verre à la fin de la journée. Mais ce sera un verre à pied.

L'abattage de deux arbres du parc

     Quand on plante un arbre, il est petit, mignon, et n'occupe que très peu de place. Les années passent et l'arbuste devient un arbre immense et encombrant. Sa cime s'approche dangereusement des câbles électriques.
     Rémi et Aurélien sont venus tronçonner un marronnier (qui est resté à l'état végétatif depuis l'an dernier) et un sapin qui poussait sur le talus et tutoyait également le réseau Enédis.
     Il a fallu prendre mille et une précautions; il ne fallait  surtout pas casser les fils! Ca peut coûter cher cette histoire! Aurélien maintenait l'arbre dont il dirigeait sa chute grâce à son engin à bras télescopique, tandis que Rémi jouait de la tronçonneuse.
     Enédis intervenait tous les ans pour couper trois malheureuses branches. Je dois dire que la facture était salée par rapport à la prestation.

Le problème est résolu! J'ai déjà commencé à débiter le marronnier. Il nous fournira du bon bois de chauffage.

 

Embruns de liberté




Un vent de liberté
Souffle Sur les bruyères
Le ciel bleu de l’été
M’enivre de sa lumière
Une brise d’éternité
Agite les fougères
Voici enfin l’été
La fin de ma carrière

Un vent de liberté
Souffle sur les fougères
Sur ces sentiers côtiers
Qui surplombent la mer
Un vent de liberté
M’envole en Finistère
Oh belle sérénité
Sensuel effet mer

Un vent de liberté
Souffle sur les bruyères
Embruns au goût salé
Qui point ne désaltèrent
Les mouettes effarouchées
De leur vol fendent l’air
Un vent de liberté
 L’école buissonnière

Un vent de liberté
Souffle sur les fougères
Ajoncs d’or et rochers
Rendent ma course légère
Au diable le passé
Même si j’apprécie hier
Je laisse mon âme errer
Dans ce monde désert

Un vent de liberté
Souffle sur les bruyères
Une forteresse gardée
Un Sémaphore austère
Pointe de Toulinguet
Et son camp militaire
Sont venus dégriser
Mon ivresse passagère

Un vent de liberté
Souffle sur les bruyères
Le moment sublimé
D’un petit fonctionnaire
Combien J’aime à rêver
Là entre ciel et terre
Adieu craie et cahier
Bientôt plus rien à faire

Un vent de liberté
Souffle sur les fougères
Les années ont passé
Aussi vite que l’éclair
Agréables journées
Balades, jardin ou mer
Mille plaisirs partagés
Dans un bel écrin vert
Un vent de liberté
Encore mille choses à faire.